lundi 20 juin 2011

Derniers adieux à Claude Léveillée


Valérie Simard
La Presse
«Claude, envole-toi. Cours rejoindre ton fils Pascal qui t'attend au fond de la galaxie parmi ces milliers d'étoiles que tu as imaginées pour lui.» Serge Martin a rendu un dernier hommage à son ami Claude Léveillée, samedi, en compagnie d'un millier de personnes réunies à la basilique Notre-Dame pour célébrer les funérailles de l'auteur-compositeur-interprète et comédien décédé le 9 juin dernier à l'âge de 78 ans.
Artistes, amis, politiciens et membres du public et de sa famille ont dit un dernier adieu à ce grand nom de la chanson québécoise. Robert Charlebois, Gilles Vigneault, Luc Plamondon, Richard Séguin, André Gagnon: tous étaient là pour saluer cet artiste qui les a tant marqués. «Léveillée a créé un mouvement avec les Bozos, a souligné Robert Charlebois. Avec Gilles Vigneault, on se disait: «Tiens, on fait des chansons à nous.» Parce qu'avant eux, on n'avait toujours fait que des chansons françaises et américaines.»
Quelques jours avant la mort de Claude Léveillée, Gilles Vigneault lui a rendu visite à sa résidence de Saint-Benoît-de-Mirabel. «Je ne m'attendais pas à ça (à ce qu'il meure), a-t-il partagé après la cérémonie. Il m'a gardé une heure et demie alors que je n'étais là que pour 20 minutes pour ne pas le fatiguer. Il était serein.» «C'était un grand grand grand mélodiste», a ajouté M. Vigneault.
Les funérailles de Claude Léveillée ont été célébrées par son ami, l'abbé Raymond Gravel. Dans son homélie, l'abbé Gravel a rappelé l'humanisme de «Monsieur Claude», comme il l'appelait affectueusement. Il a également souligné «le long calvaire» qu'a traversé l'artiste depuis son premier accident vasculaire cérébral survenu il y a sept ans. Un calvaire qu'a aussi rappelé son infirmière personnelle, France Lebeau, qui a veillé sur lui 24 heures sur 24, sept jours sur sept, pendant sept ans. «Claude était un grand homme de la musique, mais pendant les sept dernières années de sa vie, il a été un grand homme de la souffrance», a-t-elle témoigné. Mme Lebeau a raconté comment, après son premier ACV, il a dû faire le deuil de son autonomie, de sa carrière et de son piano. «Sachez que je lui tenais la main (dans les derniers instants)», a-t-elle ajouté. Sa biographe, Marie-Josée Michaud s'est également adressée directement à lui «pour une dernière fois».«Regarde qui est là pour toi, pour t'accompagner dans ta dernière scène de vie», lui a-t-elle dit.
Proches et amis se sont succédé au micro pour rappeler avec émotions l'homme passionné et aimant qu'il était. «Ta famille est très nombreuse, a déclaré son ami Serge Martin. Tous ces petits et petites Frédéric qui sommeillaient au fond de nos coeurs et tous ceux qui, aujourd'hui, portent fièrement ton nom sont des porte-étendard de ton talent.»
Plusieurs artistes ont pris part à la cérémonie, dont le pianiste André Gagnon, grand complice de Claude Léveillée. André Gagnon a joué Le piano de Claude, une chanson qu'il a composée il y a un an et demi pour lui exprimer sa reconnaissance. Sur le parvis de la basilique, après la cérémonie, M. Gagnon a fait part de l'émotion qui l'a étreint au moment d'entamer les premières notes. «J'ai dû recommencer au début, a-t-il indiqué. Ce n'était pas la mémoire. C'était l'émotion. Il n'était pas question que je quitte le banc du piano. Ça ne m'est pas arrivé souvent d'être pris comme ça par l'émotion.»
Au terme de la cérémonie, qui a duré près d'une heure et demie, l'assistance a dit adieu à Claude Léveillé sur les notes de Frédéric. Des colombes ont ensuite été lâchées dans le ciel montréalais par les membres de sa famille, pendant que quelques mètres plus loin, des citoyens expliquaient à des touristes curieux l'importance de cet homme que le Québec venait de perdre.

Funérailles nationales

Le producteur Guy Latraverse, qui a été l'imprésario de Claude Léveillée pendant près de 20 ans, a déploré le refus du gouvernement québécois d'organiser des funérailles nationales en mémoire de l'auteur-compositeur-interprète. «Les politiciens ont droit à des funérailles nationales, a remarqué M. Latraverse. Le testament de Léveillée, à mon avis, comme musicien, comme compositeur, comme protecteur de la langue française est plus important que celui d'un politicien qui a fait passer telle loi. C'est important aussi. Mais, pourquoi pas les deux?»
Questionnée sur le sujet, la ministre de la Culture et des Communications, Christine St-Pierre, a assuré que le gouvernement soulignera le travail de Claude Léveillée en nommant un lieu à sa mémoire, à la Place des arts, où il a été le premier à chanter en 1964.
Vendredi soir, les proches de Claude Léveillée ont reçu les condoléances du grand public lors d'une veillée funèbre tenue à la Place des arts. Plus de 500 personnes ont défilé devant le cercueil de M. Léveillée qui était fermé, conformément à ses souhaits. La dépouille de Claude Léveillée sera enterrée au cimetière Notre-Dame-des-Neiges sous un monument qui portera l'inscription: «Je vous ai tant aimés.»


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